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22 juin 2018 - 16:59

LE DIGITAL A BESOIN D’UN «DIGITAL ACT»

Le digital n’a pas fini de nous intriguer. Il a chamboulé nos habitudes et modifié radicalement nos rapports sociaux et nos représentations. En entreprises, il a bouleversé les modèles économiques, redéfini les compétences, transformé les métiers et horizontalisé les organigrammes. Le digital n’est plus une simple technologie, un effet de mode ou un sujet de laboratoire. C’est une réalité économique et un champ social spatial et temporel.

Tous enchaînés à notre connexion

Depuis que nous sommes affranchis de rester coincés devant nos ordis sédentaires et migré massivement vers le digital, nos doigts sont en permanence mobilisés pour rédiger des mails, envoyer des textos, des likes ou des tweets. Ne pas avoir de smartphone est aujourd’hui synonyme d’excentricité et de marginalité. La digitosphère est un espace où on trouve de tout. Un des cofondateurs de Google avait déclaré : «Nous créons en ligne toutes les 48h autant de contenu que nous en avons créé depuis la naissance de l’humanité jusqu’à 2003». C’est d’autant plus impressionnant que c’est essentiellement le résultat de l’activité des internautes. Le web 2.0 s’est popularisé à grande vitesse. En 2020, plus de cinq milliards de personnes seront connectées, sans parler des 50 milliards d’objets. Plusieurs pays de la planète comptent plus d’abonnements mobiles actifs que d’habitants. Avec l’avènement du digital, le monde est en train de se «prototypiser». Sur le web, cela bascule à une vitesse telle que toutes nos certitudes sont précaires et sujettes à obsolescence rapide.

Le digital, un univers social qui impose ses codes Un espace de dialogue au fil continu, où on multiplie les amis «high tech». Cet espace de développement de chaînes relationnelles massives a ses codes et ses maîtres mots : le anytime, anywhere, le free of charge, le peer-to-peer, l’accessibilité, le temps zéro et l’immédiateté comme le dit joliment le groupe de Rap IAM : «L’avenir, c’est la minute d’après». C’est aussi un monde de l’interruption : alertes, sonneries, e-mails. Difficile après de retrouver le fil de ses idées et de ne pas tomber, faute de temps, dans la superficialité. Dans cet univers, nous assistons aussi à l’émergence de la société du «Moi...je», à l’avènement du «moi» augmenté, hypertrophié. La culture du selfie, de

l’autoportrait en est une des nombreuses illustrations.

Un digital peut en cacher un autre

Espace d’ouverture oui, mais aussi de fermeture aussi. Avec le «Moi d’abord», «Ma communauté d’abord» le web n’abolit pas les différences culturelles, idéologiques ou linguistiques. Il prolonge les variables sociologiques traditionnelles de notre société et les consacre. On reste collé à son monde, à sa communauté ; on parle avec ses proches, ses amis, ses semblables. Facebook est d’ailleurs basé sur le concept du «keep it real, keep it local” (Chris Hughen, co fondateur). Et comme toute technologie, il accentue les fractures et les inégalités en avantageant les early adopters. En tant que champ social, le web hérite de toutes les dérives de la société réelle : espace de déchainement d’acteurs parfois sans foi ni loi contre des personnes ou des institutions. Le digital crée une dépendance et a généré des pathologies inédites. Le fear of missing (FOMO) désigne un sentiment d’anxiété voire d’infériorité liée à la peur d’avoir raté un événement social sur le web, Infobésité : comprendre et maîtriser la déferlante d’informations. Des millions de personnes dans le monde souffrent de nomophobie (no mobile phone phobia) : souffrir de ne pas avoir son portable à portée de main.

Les entreprises, «first movers» ou «fast followers» ? 

Grâce à leur smartphones, les clients ont souvent plus d’informations que le commercial ou le vendeur en boutique. Le digital est un univers où les utilisateurs sont souvent en avance sur les entreprises avec un outil de recommandation puissant : le social. Les marques ont, de ce fait, été forcées à s’omnicanaliser, à s’humaniser, à adopter les codes du digital et de ses réseaux. Pour Tony Hsieh, grand maître de la relation client et PDG de ZAPOS, «les gens s’identifient à d’autres gens et non pas à des entreprises». Les marques tentent ainsi de donner de leur temps, d’alimenter un débat amical et bienveillant avec leurs publics, afin de créer des communautés «engagées». Le digital : un monde d’opportunités

Pour les entreprises, les technologies digitales constituent une source de création de valeur externe et un driver de business. En interne, c’est un levier de productivité managériale et de créativité. Pour les jeunes, le digital peut générer des opportunités massives d’emplois, en particulier pour ceux qui décrochent du système scolaire et qui disposent d’aptitudes digitales.

PME, TPE et jeunes générations ont besoin de soutien et d’accompagnement pour réussir dans ce nouvel univers et capitaliser sur les nombreuses fenêtres qu’il leur ouvre. Il est impératif que le digital bénéficie, au niveau national, d’un programme fort, d’une sorte de «Digital Act», pour que tous les acteurs puissent se saisir des nouveaux horizons qu’offre le flux digital. Pour certains d’entre eux, c’est un enjeu de survie.

Cet article est paru, pour la première fois, dans le livre blanc «Digital Act», publié à l’occasion de l’annonce de création du think tank, en marge du «Ftour 2.0» édition 2017.